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L'intérêt pour la littérature française naît en Pologne au temps du mariage du roi Ladislas IV avec une princesse française, Marie-Louise de Gonzague (1645). Entre autres on voit apparaître les traductions des histoires tragiques qui introduisent dans la littérature polonaise un nouveau type de nouvelle, dominée auparavant par le ton facétieux de Boccace. Les Histoires Tragiques de Rosset ont été traduites trois fois. L’Histoire XIII se retrouve vers 1661 sous la plume d’un des meilleurs poètes sarmates de cette époque, l’arien Wacław Potocki, qui en donne une adaptation en vers basée sur un remaniement latin méconnu (Historia Florydana z Lydią). Le même texte sert de base pour une traduction anonyme en prose, datée environ 1707 (Ossolineum, ms. 55287, fol. 270-289), qui reste en dehors de notre étude. Quatorze nouvelles de Rosset sont traduites dans le recueil manuscrit attribué selon les recherches récentes au jésuite Michał Jurkowski, Historie świeże i niezwyczajne, daté entre 1711 et 1715, se trouvant dans la Bibliothèque PAU à Cracovie (ms. 1301). Les traducteurs de Rosset suivent la tendance des auteurs sarmates à paraphraser librement le texte original. W. Potocki introduit de nouveaux personnages, complique l'intrigue, approfondit le portrait psychologique des protagonistes. Peu fidèle à la lettre du texte de Rosset, il sait néanmoins reconstituer les principes du genre: vraisemblance historique, emploi de différentes formes de discours, présence du conflit tragique des valeurs, interprétation métaphysique des aventures. Grâce à cela, il retrouve l’esprit de l’histoire tragique. Le jésuite Michał Jurkowski donne à ses traductions un caractère assez simpliste. Elles constituent des résumés des intrigues de Rosset et ne permettent pas d'entrevoir leur dimension psychologique, morale et rhétorique. Malgré certaines maladresses, surtout en ce qui concerne la peinture de la vie psychique des héros, on doit reconnaître le talent narratif de l’auteur et goûter plusieurs fragments bien réussis. On peut supposer que le recueil avait un caractère utilitaire et devait constituer un répertoire d'exempla à l’usage de l’auteur lui-même ou de ses confrères. Replacés dans le contexte d’un sermon, les schémas narratifs empruntés à Rosset pouvaient retrouver leur relief originaire et non seulement épouvanter, mais aussi instruire et ramener les pécheurs sur le chemin de la vertu.